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Entre tradition et modernité, l’efficacité commerciale aujourd’hui. Entretien avec Nicolas Caron – 2ème partie

Rédigé par Léa Dijoux | 26 sept. 2019 05:15:00

Les ressorts de l’efficacité commerciale n’ont pas de secrets pour Nicolas Caron ! Passionné par les métiers de la vente, il a cofondé avec Frédéric Vendeuvre, en 2003, le cabinet de formation commerciale et de conseil Halifax Consulting. Leurs équipes accompagnent chaque année des milliers de commerciaux des plus grandes entreprises internationales partout en Europe, en Asie et sur le continent américain.

Nous avons eu envie de rencontrer Nicolas après avoir lu son ouvrage « Lève-toi et vends ! », un livre à la fois souriant et percutant que tous les commerciaux – et même les non commerciaux – soucieux d’efficacité et de performance devraient s’empresser de lire !

La  de l'interview vous a plu ? Découvrez la suite de l'entretien dans ce billet !

Vous écrivez dans votre dernier ouvrage que « les meilleurs commerciaux sont ceux qui font ce que les autres n’ont pas le temps de faire ». Comment s’y prennent-ils ? Et que font-ils de plus ?

C’est quelque chose que je répète à l’envi depuis que j’ai démarré cette carrière. C’est une évidence : dans une entreprise, alors que le marché est le même pour tous et que les clients se ressemblent, certains commerciaux réussissent et d’autres pas. Et ce n’est pas qu’une question de « talent » ! C’est exactement comme dans le sport : on s’ébaubit devant la victoire, devant le « talent » du joueur qui vient de gagner. Ce qui devrait susciter l’admiration, c’est tout le boulot qui a mené à cette victoire – et qu’on oublie.

Aujourd’hui, dans la plupart des secteurs, la concurrence n’est pas entre l’entreprise A et l’entreprise B, mais entre le commercial de l’entreprise A et le commercial de l’entreprise B.

Il n’y a pas de secret : les commerciaux qui réussissent sont ceux qui considèrent ce métier comme un vrai métier, qui font l’effort de préparer sérieusement, qui se demandent toujours quelle valeur ajoutée ils vont pouvoir apporter à leurs clients, qui se soucient de ne pas leur faire perdre leur temps et qui, pour toutes ces raisons, arrivent à laisser leur empreinte chez les clients. Parce que, finalement, aujourd’hui, dans la plupart des secteurs, la concurrence n’est pas entre l’entreprise A et l’entreprise B, mais entre le commercial de l’entreprise A et le commercial de l’entreprise B. Quand après avoir vu ces deux commerciaux, je me dis « cette boîte est top », en réalité ce n’est pas à la boîte que je pense, mais au commercial.

Pour résumer, les meilleurs commerciaux sont ceux qui font à fond la partie cachée. Je les compare à des canards : on a l’impression qu’ils sourient et qu’ils avancent sans effort, mais sous l’eau, ils pédalent ! Pour les commerciaux, c’est pareil : les « meilleurs » sont avenants, souriants, agréables, mais ils pédalent – et ils pédalent plus que les autres. Ça ne se voit pas, mais ils bossent et ils font le nécessaire pour être au top.

Ces « meilleurs » commerciaux, qui ont plus d’impact sur leurs clients et clients potentiels, ont-ils une autre gestion du temps que les moins bons ?

Oui, absolument ! Ce sont des gens rigoureux dans leur organisation. Être le plus souvent possible au bon moment au bon endroit, c’est de . Préparer plus que les autres, c’est de la gestion de son temps. Et le contraire d’une bonne gestion de son temps, c’est la dispersion permanente, le zapping, le papillonnage…  Les commerciaux qui font la différence appliquent trois principes simples :

Le premier est de respecter des séquences de travail homogènes. Il suffit d’aller dans les bureaux pour voir que les gens passent sans arrêt d’une tâche à l’autre. On ne peut pas progresser sérieusement sur quelque chose sans se concentrer un minimum. Donc, respecter un temps d’une heure pour travailler sur un sujet et préparer vraiment un dossier, on peut dire que ce n’est quand même pas le bout du monde. Ce qui est le bout du monde, c’est d’arriver à fermer son téléphone. Les commerciaux ne sont pas des médecins urgentistes qui doivent répondre à n’importe quelle sollicitation à la seconde ! Donc, c’est une question d’état d’esprit : les gens doivent apprendre à se concentrer. Et se concentrer vraiment, ça permet de faire beaucoup plus de choses et de faire justement ce que les autres n’ont pas le temps de faire. C’est le premier principe.

Le contraire d’une bonne gestion de son temps, c’est la dispersion permanente, le zapping, le papillonnage… 

Le deuxième est que « faire très bien des choses idiotes est idiot»… Pas besoin de chercher très longtemps pour voir des gens qui font très bien des choses idiotes – c’est-à-dire des choses qu’ils aiment faire, mais qui n’ont pas de valeur ajoutée, pas d’impact, qui ne provoquent pas de retour sur investissement pour le business. Il faut apprendre à faire le tri entre ce qui me fait plaisir et ce qui est vraiment efficace et fait avancer le business.

Le troisième, c’est que les gens détestent perdre leur temps tout seuls… Donc, ils viennent vous voir ! Il faut savoir s’en protéger… C’est très bien d’être sociable, mais il y a un moment où il faut mettre des barrières et ne pas accepter les diversions du matin au soir.

La pression des outils technologiques ne va pas se réduire… Qu’est ce qui va faire la différence pour le commercial de demain ? Les outils ou autre chose ?

Je ne parlerai pas de « pression » des outils. Les outils ne vont pas contre la finalité du métier. Ce qui est problématique, c’est de se contenter de les utiliser en surface en s’imaginant qu’ils vont changer la vie. Nous avons aujourd’hui des outils absolument merveilleux, qui permettent de faire des choses dont on a toujours rêvé et qu’on n’osait ou ne pouvait pas faire. Dans notre métier de la formation, par exemple, les principes que nous mettons en place aujourd’hui, je les avais en tête il y a 20 ans. Sauf qu’il y a 20 ans, je ne pouvais pas les mettre en œuvre. Il faut se saisir des outils et les utiliser à fond.

Dans tous les métiers qui vont être affectés par l’intelligence artificielle, ce qui fera la différence, ce sera justement la culture générale, la prise de hauteur.

On entend souvent des patrons dire « nos jeunes commerciaux n’ont pas assez de culture générale ». Partagez-vous ce point de vue ?

Oui, je le partage. Et je pense que cela ne concerne pas que les commerciaux… Dans tous les métiers qui vont être , qui va révolutionner nombre de métiers, ce qui fera la différence, ce sera justement la culture générale, la prise de hauteur. Ce qui va être remplacé par l’IA, ce sont les gestes techniques que les machines font beaucoup plus vite que nous. Mais la culture générale, le pouvoir de la discussion, de l’empathie, de la compréhension, le goût du challenge, tout cela restera dans les mains du commercial, et dans les mains des autres métiers. Cela passe par cette prise de recul et de hauteur qui vient de la culture générale que l’on a, au-delà de son expertise technique. Ce n’est pas l’un ou l’autre, il faut les deux.

Si je comprends bien, les outils sont des alliés, mais ne changent pas les fondamentaux du métier…

Les outils ne suffisent pas. C’est vrai dans tous les domaines. Récemment, ma fille a fait un mémoire sur l’architecture japonaise. Et son mémoire s’intitule « Entre tradition et modernité ». Quand j’ai vu son titre, je me suis dit « mais c’est exactement la même chose pour nous ! ». Aujourd’hui faire du business, c’est être entre tradition et modernité : ne pas avoir peur et capitaliser sur tous les outils qu’on nous propose et qui peuvent nous aider à aller beaucoup plus vite sur certaines fonctions, sur certaines tâches ; sans oublier la tradition, c’est-à-dire les fondamentaux de la vente, du commerce. Parce que les outils ne font rien sans que nous les accompagnions, sans que nous sachions les optimiser. Mais pour ça, il faut avoir les réflexes business fondamentaux, mais aussi la culture générale, l’entregent, la passion, l’enthousiasme et puis l’abnégation pour pousser ses affaires jusqu’au bout.